Cosmologie : pourra-t-on échapper au "Grand Déchirement" (ou "Big Rip") ?

Bonjour à tous, le règlement du Forum, que je relis religieusement tous les soirs avant de m'endormir, nous autorise, en son article 2, à publier des posts concernant l'astronomie, à condition qu'ils ne soient pas trop nombreux. Le présent fil va donc être consacré à la perspective du "grand déchirement" (Big Rip) dans quelques milliards d'années et aux pistes de réflexion pour éventuellement parvenir à y échapper.

Blaise Pascal écrivait dans ses Pensées, à propos de l'univers : "le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie".

Eternel, vraiment ?

Les progrès de la cosmologie contemporaine ont permis de préciser les raisons d'être effrayé ou déprimé par l'immensité des espaces qui se dévoilent aux hommes la nuit, s'ils ne dorment pas et lèvent leurs yeux vers le firmament. Non seulement la Terre et le soleil sont voués à disparaître dans quelques milliards d'années (en espérant que d'ici-là, nous aurons pu migrer vers les étoiles...) mais l'univers lui-même n'est pas assuré de sa pérennité ; ce qui est plus gênant, car nous ne connaissons actuellement aucun "ailleurs"' où nous pourrions nous réfugier.

Oui, l'univers est mortel, et la cosmologie décrit les différents scénarios qui peuvent conduire à sa disparition.

Je ne parlerai pas ici du scénario de l'effondrement terminal (Big Crunch) ou de celui de la mort thermique de l'univers (Big Freeze). Pour l'instant, il semble que l'accélération de l'expansion nous mette à l'abri du Big Crunch, et le Big Freeze ne sera pas une véritable menace avant des dizaines ou des milliers de milliards d'années. Mais un troisième scénario, celui du "Grand déchirement", ou "Big Rip", pourrait détruire notre univers à l'horizon d'une quinzaine de milliards d'années ! Dans ce cas, notre univers aurait déjà vécu presque la moitié de sa vie depuis sa naissance !

Soyons plus précis : l'univers se dilate actuellement au rythme de 67,4 km par seconde et par mégaparsec selon les mesures effectuées par le satellite européen Planck.

A titre d'illustration, d'après mes calculs, et sous le contrôle des autres membres du Forum, si vous mesurez 1,75 mètre et si vous attendez un quart d'heure à la caisse de votre hypermarché, vous croyez que vous perdez votre temps et qu'il ne se passe rien, mais en fait vous vous dilatez légèrement dans toutes les directions et en particulier, verticalement, vous grandissez de 364 milliardièmes de nanomètre. C'est peu, mais à l'échelle d'une vie on arrive à une croissance un peu plus significative. Evidemment on ne se rend jamais compte de rien car tout autour de nous se dilate dans les mêmes proportions. Le phénomène n'est perceptible par les instruments astronomiques que sur de grandes échelles de distance, du fait du décalage de la lumière vers le rouge, d'autant plus prononcé que la source émissive de lumière est éloignée.

Plus inquiétant, comme la plupart des habitués de ce Forum le savent, l'expansion de l'univers semble s'accélérer sous l'effet de ce que les astronomes appellent "l'énergie sombre".

Personne ne sait quel phénomène est derrière l'énergie sombre. Pourquoi est-ce que l'expansion accélère ? Est-ce sous l'effet d'une propriété intrinsèque de l'espace, du vide ? Ou notre univers fait-il partie d'un multivers dont des objets pourraient étendre leur influence jusqu'à nous, et provoquer cette accélération ? Inutile de se perdre en conjectures, sur ce sujet, on ne sait quasiment rien. Par conséquent, on ne peut que constater le risque que l'accélération de l'expansion conduise au Big Rip, et on ne voit pas trop comment même la plus brillante des civilisations de l'univers, d'ici à quelques milliards d'années, pourrait trouver un procédé pour éviter cet anéantissement. Encore que, si on réfléchit bien...

Evidemment, la perspective déprimante du Big Rip ne pèse pas sur les cours des actions à la Bouse de Paris, à celle de New York ou celle de Shanghai, et elle n'a pas d'effet direct sur la santé mentale des jeunes, dont la plupart ignorent tout de cette menace cosmologique. Bien sûr, c'est un horizon très lointain, mais se dire qu'un jour, il n'y aura plus aucune étincelle de vie et d'intelligence dans l'univers, qu'il n'y aura plus de planètes, d'étoiles et ni même de matière, n'est pas neutre philosophiquement. Cela peut alimenter "l'a-quoi-bonisme" parmi les doctorants en astronomie et les les plus hautes élites scientifiques de notre planète, qui sont des relais d'opinion en direction du grand public.

"Il ne faut pas désespérer Billancourt", aurait dit Jean-Paul Sartre dans les années soixante, en pensant au soutien du moral de la classe ouvrière. Au XXIème siècle, il importe de "ne pas désespérer Berkeley !"

Même si toutes les intelligences de l'univers, dans quelques milliards d'années, post-humains et extraterrestres "main dans la main" (pour autant qu'ils possèdent encore des mains FB_rire3

...) se coalisent pour agir ensemble par des moyens industriels prodigieux, je ne vois pas comment il serait possible de neutraliser l'accélération de l'expansion de l'univers, car la vitesse de la lumière est trop lente pour qu'un quelconque procédé puisse agir sur l'univers tout entier jusqu'à ses plus extrêmes périphéries (ce qui d'ailleurs ne doit pas être le bon terme, car je ne crois pas que l'univers ait un centre et une périphérie).

Mais une idée m'a traversé l'esprit : ces intelligences de l'avenir, aux immenses pouvoirs technologiques, pourraient fabriquer, à l'intérieur de notre univers et avant son déchirement, des univers de secours. Autrement dit, ils pourraient déclencher des Big Bangs et fabriquer d'autres univers pour s'y réfugier, et si la physique interdit de rentrer dans un nouvel univers inscrit dans le nôtre à la manière des matriochkas russes, nos successeurs pourraient orienter les lois physiques des nouveaux univers de manière à ce qu'ils soient encore plus propices à la vie, et surtout pour qu'ils ne subissent pas eux-mêmes une expansion non maîtrisée et un nouveau Big Rip...

Les bébés univers de secours, s'ils sont générés à temps, survivraient au déchirement de notre univers et porteraient plus loin, sur des milliards d'années, le flambeau de la matière, de la vie, de l'intelligence, de la compassion, de l'amour, du bonheur, des arts et de la sensibilité.

Le schéma sous-jacent à cette hypothèse pourrait de surcroît expliquer nos propres origines : des intelligences primordiales menacées par la désintégration de leur univers ancien et raté auraient provoqué notre Big Bang, elles se seraient à leur tour plantées, et elles n'auraient pas pu empêcher l'accélération de l'expansion et la désastreuse évolution de notre univers vers le Big Rip. L'énergie sombre, ce serait simplement un phénomène imprévu et le fruit de l'incompétence de nos créateurs, qui avaient probablement de bonnes intentions et ont tenté de bien calibrer le Big Bang, mais n'ont pas su maîtriser la suite du processus.

Bien entendu, nous sommes là dans une réflexion extrêmement spéculative, mais qui peut-être pourra un jour lointain être plus ou moins étayée par des observations scientifiques indirectes.

Je demande donc aux membres de ce Forum s'ils ont connaissance de travaux scientifiques sur la même thématique, ou simplement d'ouvrages de science-fiction abordant ce sujet aussi essentiel pour répondre aux grandes interrogations philosophiques : d'où venons-nous, de quoi finirons-nous par être capables, vers où pouvons-nous aller, et que devons-nous dès maintenant commencer à faire pour que le sens et la conscience l'emportent sur les ténèbres et l'absurdité.

Dubitatif me laisse ce post ! Mais où PierredeSedna va-t-il chercher tout ça, juste pour monter d'un cran mon taux d'angoisse ?

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Le concept de métastabilité de l'univers représente une situation encore plus chelou que celle du "big rip". En effet, le vide actuellement observé pourrait être un vide faux, et non pas un véritable état de vide, car il ne se trouve pas dans un état d'énergie minimale. Les valeurs mesurées de la masse du boson de Higgs à 125 GeV et celle du quark top à 173 GeV indiquent une position critique, proche de la frontière entre stabilité et métastabilité. Si une région de l'univers venait à adopter un état de basse énergie par le biais d'un effet tunnel, cela engendrerait la formation d'une bulle de véritables vides qui se propagerait à la vitesse de la lumière, annihilant tout sur son passage.

Imaginons alors un scénario où nous développerions un détecteur capable d'identifier les tachyons, ces particules théoriques et insaisissables se déplaçant à des vitesses supraluminiques. Supposons que nous puissions obtenir une image d'un univers tachyonique. Comment réagirait l'humanité si cette détection révélait l'existence d'une immense bulle vide vide de ces particules, dont la limite serait située, disons, à environ quatre années-lumière de notre planète ? Étant donné que les informations fournies par les autres particules standards ne montreraient aucune anomalie apparente, quelle serait alors la réaction des individus ? Que penseraient-ils ? Accepteraient-ils l'idée que notre monde disparaîtrait dans quatre ans sans aucun signe avant-coureur, en une fraction de seconde ? Chercheraient-ils un moyen d'inverser ce processus ? Un tel scénario constituerait assurément un thriller psychosocial captivant. FB_rire2

EN SF, je ne crois pas que le Big Rip a été abordé à ma connaissance. Le Big Freeze oui je me rappelle des lectures à ce sujet mais lisant beaucoup impossible de me rappeler les auteurs, Baxter peut être ?

Après que devenons commencer à faire ? Et bien s'occuper déjà de notre Terre et il y a du boulot et loin d'être gagné...... l'extinction des espèces, cela n'arrive pas forcément qu'aux autres...

A te lire, tu es proche de la sensibilité du principe anthropique fort PierredeSedna ;)