Akwa a écrit:Même Avatar possède des vaisseaux parfaitement réalistes (voilier solaire et moteur à fusion nucléaire), qui ne font pas de bruit dans l'espace. Et les images y sont plus belles, plus réalistes et plus crédibles.
Concernant le vaisseau d'Avatar, oui, bien d'accord, il est doté d'ailleurs de gigantesques radiateurs qui font défaut à la quasi intégralité des films de SF. Très bon point, effectivement.
Pour le reste, je suis plus mitigé, il y a des tas d'incohérences ou de fils non exploités :
* si l'on dispose d'une astronef interstellaire capable de transporter des gens en quelques années, et de les ramener avec de si petits réservoirs, cela signifie que l'on produit un gros jet à des vitesses relativistes ou presque. En être capable, c'est aussi être capables de déployer une puissance énergétique susceptible de vaporiser des mers. Dans ce cas, désolé, pour détruire un "arbre de la vie", on n'envoie pas une navette civile avec des bombes volant au ras du sol, on brûle la forêt sur 1000 km² depuis l'orbite en "mettant les gaz" pendant moins d'une seconde. Cette scène du film est profondément inadéquate.
* pour aller plus loin, il n'y a
absolument aucun sens à aller chercher des ressources dans un autre système solaire. L'énergie dépensée pour y aller - et revenir - serait largement suffisante pour produire n'importe quoi à la maison, à partir de panneaux solaires, d'un accélérateur à particules ou d'une source de neutron (on reproduit localement une supernova). La seule chose qui pourrait mériter un tel voyage, sans se contenter d'informations, serait éventuellement des œuvres d'arts que des collectionneurs richissimes du système solaire seraient près à payer plusieurs dizaines de fois le PIB terrestre d'aujourd'hui. Mettons des œuvres Na'vis. Dans ce cas-là, il n'y a pas de sens à les exterminer et le film perd son sens.
* la Terre est décrite comme surpeuplée et au bout du rouleau du point de vue énergétique. Aujourd'hui, il est inconcevable ne serait-ce qu'envoyer
une sonde vers un autre système stellaire sans devoir supposer infrastructure spatiale à l'échelle du système solaire (cf. Deadalus). Une telle infrastructure suppose de façon quasi-certaine que l'être humain peut vivre dans l'espace dans des habitats spatiaux (exit la surpopulation). Par ailleurs, une Terre épuisée énergétiquement n'a aucun moyen de mobiliser des ressources énergétiques aussi colossales que celles nécessaires à une mission interstellaire (exit l'épuisement énergétique). La trame de base veut certes "faire réfléchir sur l'écologie" (sans grande originalité d'ailleurs), mais c'est raté dans ce contexte.
* C'est dommage d'ailleurs, car l'unobtainium est décrit comme indispensable à la survie de la Terre. Cela fait de Jake un terrible sociopathe qui préfère sa petite vie Na'vi à celle de milliards d'habitants. Faire chanter Jake sur l'opération qui devrait lui rendre ses jambes, c'est également un peu idiot, quand il semble que l'on dispose d'une technique de clonage, et de moyens de transférer définitivement l'esprit humain dans un nouveau corps. A mon avis, le transfert d'Avatar est plus simple d'un humain à autre humain, surtout lorsque c'est son propre corps cloné. Ses amis scientifiques ne lui en parlent même pas (sociopathes, aussi ?).
* On peut passer sur le fait que les flèches ne traversent pas les cockpits, puis les traversent, ou encore le fait que les Na'vi très grands, semblent pouvoir tenir des armes très technologiques et très humaines dans les mains à la fin, sans les rejeter d'ailleurs. La techno a du bon, parfois... quand c'est nécessaire... ou qu'on en a envie... tout le temps ?
* Pour finir, Cameron rate à mon avis une certaine aventure intellectuelle. Les Na'vi ne sont pas malades, ont de belles dents, ont de l'éclairage, et peuvent conduire des animaux comme on démarre une voiture ou un avion. Soit ils ont un coup de bol monstrueux au niveau évolutif conduisant à ne pas avoir besoin de technologie comme ces pauvres terriens terriblement plus défavorisés par la nature, soit... osons... leur monde a été l'objet d'une ingénierie génétique de grande ampleur dans le passé, visant à transformer Pandora en Eden ; les Na'vis, des Eloïs ? Et là des perspectives s'ouvrent : recherche de ces ancêtres et redécouverte de leur histoire, découverte d'armes anciennes destinées à ce genre de cas, utilisation d'armes bactériologiques pour chasser les humains (en les rendant juste malades, ou mélancoliques, gentils comme des Na'vi, ou empathiques (un virus "Na'vi-ma-vie" ?), utilisation de l'immense réseau planétaire de la vie pour "hacker" les vaisseaux humains, ou un peu comme dans Solaris, les perdre dans des puzzles photo-réalistes ? etc... Non je suis désolé, convaincre l'arbre de la vie qui commande à tous les arbres et animaux de la planète entière, pour...
une charge de rhinocéros !! c'est vraiment... vraiment... bof ?
Avatar claque visuellement, c'est indéniable. C'est une fable, que l'on peut aimer ou pas. Mais parler de cohérence et surtout de SF, c'est excessif : les Na'vis sont des indiens peints en... bleu, rien de plus. Interstellar exploite une idée scientifique et en fait sa trame : le paradoxe du jumeau, les propriétés d'un trou noir hypermassif, et suit le fil de cette idée jusqu'à la fin. Imparfaitement, c'est indéniable. Mais rares sont les films à ne serait-ce que faire cela : de la SF, pas du Western. Et c'est à mon avis un grand mérite lorsque servi avec une histoire prenante, des situations originales et, pareil, des effets spéciaux qui claquent.