vendredi 12 janvier 2007, 18h11
Le secteur spatial russe fête le centenaire de son fondateur Korolev
Par Victoria LOGUINOVA
MOSCOU (AFP) - Le secteur spatial russe a fêté vendredi le centenaire de la naissance de son fondateur, Sergueï Korolev, père du Spoutnik, des premiers missiles et vaisseaux spatiaux soviétiques, alors que ses élèves continuent à développer d'ambitieux projets.
L'anniversaire de cet ingénieur de légende (1907-1966), qui a envoyé le premier homme dans l'espace en 1961, a été célébré en grande pompe à Korolev, cité scientifique qui porte son nom, au nord de Moscou, et où siège la société de construction spatiale RKK Energuia qu'il avait fondée en 1946.
Le président Vladimir Poutine a rendu hommage au "génie scientifique", lors d'une cérémonie solennelle au Kremlin et a reçu sa fille, Natalia Koroleva, lui offrant un bouquet de fleurs.
M. Poutine a souhaité qu'une jeune génération d'ingénieurs continue sur la lancée de M. Korolev, pour que la Russie "puisse garder sa place parmi les plus grandes puissances spatiales au 21ème siècle".
Arrêté en 1938, au début de sa carrière, sous une fausse accusation de sabotage, ce futur héros de la conquête spatiale a passé six ans dans les prisons staliniennes où il a continué son travail sous la surveillance des services secrets. Il n'a été réhabilité qu'en 1957, six mois avant le lancement du premier satellite, le Spoutnik, qu'il avait conçu.
Visionnaire, Sergueï Korolev a non seulement prédit l'apparition des missions spatiales de longue durée, il avait aussi dressé pour la science des objectifs qui restent d'actualité au 21ème siècle.
"Sergueï Pavlovitch (Korolev) regardait toujours vers l'avenir. Il nous disait : 'L'espace n'est pas vide, mais contient d'énormes réserves d'énergie, et nous devons l'utiliser pour le bien de l'humanité", se souvient le constructeur Vakhtang Vatchnadzé, 77 ans, qui a participé à la création de la station orbitale Mir.
"Le 21ème siècle nous impose de grands défis: problèmes d'énergie et changement de climat avec cataclysmes. Nous devons utiliser les recherches spatiales pour régler ces problèmes et sauver l'humanité", estime M. Vatchnadzé.
La Russie s'intéresse ainsi à l'exploration de la surface de la Lune qui contient de l'hélium-3, un carburant qui pourrait remplacer le pétrole et le gaz lorsque leurs réserves sur Terre seront épuisées.
"Aller sur Mars en passant par la Lune ! C'est notre mot d'ordre aujourd'hui", affirme le successeur de M. Korolev à la tête de RKK Energuia, Nikolaï Sevastianov.
L'Agence spatiale russe se dit prête à se lancer dans la conquête de la Lune et de Mars, mais à condition de le faire en coopération avec d'autres pays.
"Après la mission Soyouz-Apollo en 1975 (connexion des vaisseaux soviétique et américain dana l'espace - ndlr), nous avons compris qu'un échange d'expérience avec les Américains pouvait être mutuellement utile", explique à l'AFP Boris Tchertok, ancien adjoint de Sergueï Korolev, qui à 94 ans continue à travailler comme consultant chez RKK Energuia.
M. Tchertok, qui avait participé aux côtés de Sergueï Korolev à la création du premier missile intercontinental balistique soviétique R-7, qui a servi de modèle pour les fusées Soyouz, déplore les problèmes financiers engendrés par la chute de l'URSS.
"Aujourd'hui, le soutien de l'Etat au secteur spatial et à la science en Russie est négligeable. Si j'étais président du pays, je limogerais tous les ministres chargés de l'Economie", s'insurge-t-il.
"Au cours de ces dernières années, nous avons observé d'énormes pertes dans le domaine de la science. Mais il faut être optimiste pour progresser", ajoute le chercheur.
Energuia, qui a dû détruire la station Mir en 2001 faute de moyens financiers pour l'entretenir, retrouve un nouveau souffle avec le développement de la coopération internationale, notamment dans le cadre de la Station spatiale internationale (ISS).
Après des années de crise, "nous avons commencé en 2005 à observer une croissance économique", se réjouit M. Sevastianov concentré aujourd'hui sur la création de vaisseaux spatiaux de nouvelle génération : Clipper pour les vols habités qui devrait remplacer les Soyouz et le cargo Parom, à la place des Progress qui approvisionnent l'ISS.