Possible, mais quel à "prix" ? Atteindre une vitesse de 0.01c signifierait que rejoindre une cible en ligne droite à 40al représente un voyage de 4000 années... Et 0.01c, c'est cooooonsidérablement plus que nos vitesses actuelles, cela fait 3 000 000 m/s, 3000 km/s ^^
DeltaM = Mf * (Exp(DeltaV/Ve) – 1)
Le DeltaM correspond à la masse carburant qu'il faut rassembler pour propulser l'engin de masse finale Mf (carburant épuisé = charge utile + masse sèche), pour atteindre un DeltaV (une vitesse) de 0.01c dans notre exemple, via une efficacité énergétique de la propulsion Ve (vitesse d'éjection des gaz, Ve = ISP*g0 ; g0 = 9.81 m/s²)
Sachant la masse de l'ISS de 420t, on prend comme exemple un véhicule de 500t incluant son système de propulsion, ainsi qu'une Ve formidable de 1 000 000 m/s, valeur que l'on retrouve dans les projets futuristes qui pourraient éventuellement faire sens : on parle quand même d'un truc sacrément efficace ici, très loin devant nos perspectives actuelles.
DeltaM = 500 000 * (Exp (3 000 000/1 000 000) - 1) = 9 500 000kg = 9500t de carburant.
Ca va ! l'équivalent de 3 Saturn5 de carburant, c'est énorme, mais techniquement jouable. En considérant qu'on arrive à les monter en orbite ou à le miner en orbite et l'acheminer.
Oh wait, il faut en réalité freiner à l'arrivée, donc DeltaV x2 ==> Et là ça fait mal. Parce que le terme Exp(DV/Ve) est impardonnable, une exponentielle quoi. On passe de Exp(3) ~ 20 a Exp(6) ~ 400... Ouille.
Donc DeltaM = 500 000 * (Exp (6 000 000 / 1 000 000) - 1) = 201 214 396kg soit plus de 200 000t de carburant pour pousser 500t de Charge Utile, une grosse soixantaine de SaturnV.
Faisons le bilan : on parle ici d'un projet de vaisseau de 500t de masse sèche, un environnement similaire à l'ISS grosso modo, pour 10 personnes, poussée par 200 000t de carburant, un ensemble absolument Dantesque qu'il faudrait assembler en orbite après en avoir acheminé les éléments, pour un voyage de 4000 ans sans compter les phases d'accélérations / décélération (vous avez vu la masse ?...), dans un objectif sans précédent (par définition) dont la réussite ne saurait dépasser un pourcentage décourageant, le tout permettant à 10 vaillants voyageurs serrés (cryo, générations, vie prolongée ?) volontaires de tenter de s'établir, et renvoyant un message à la Terre quelques 4040 années plus tard pour dire "Nous ça va, et vous ?" : QUI, qui tenterait chose pareille ? Le retour sur investissement (je ne parle pas d'argent) se ferait tellement longtemps après, pour une civilisation qui aurait tant changé, pourquoi qui que soit, même une coalition de gouvernements et de privé, se lancerait la dedans ? Même une Terre invivable me parait totalement hors de propos comme argument, 4000 plus tard, il n'y aurait soit plus rien, soit l'argent correspondant serait mieux investi dans la sauvegarde locale ou le fait de tenter / poursuivre à s'établir sur Mars !
Ca me parait délirant, inconcevable, et avec tellement d'hypothèses qui vont dans le bon sens... 400 ans semble plus alléchant pour certains ? Cela demande une vitesse de 0.1c et là... Le calcul explose littéralement, la masse à transporter devient carrément négligeable, face au terme Exp(60 000 000 / 1 000 000) = Exp (30) = 10^24 xD
C'est seulement pour ça que je dis que les maths sont un petit peu intéressante ici, ça permet d'appréhender très rapidement et simplement l'amplitude du problème, ce ratio Exp(DV/Ve) qui est dramatique. L'avantage c'est qu'on sait effectivement sur quoi bosser, l'ISP, ou la vitesse d'éjection. Mais... on est déjà à 1 000 000 dans cet exemple, qui reprend des idées de fusions nucléaires ou de Buzzard. Ces pistes "SF" ne mettent elles même pas en avant des ISP plus avantageuses. Reste l'anti-matière, ouaip, pour laquelle il est difficile de se projeter. C'est donc ici sans doute assez subjectif, mais je n'imagine pas l'antimatière permettre d'excéder une Ve de 10 000 000 : aussi énergétique que puisse t être l'annihilation, sans contrôle de cette énergie, ce n'est que perte, et parvenir à une telle efficacité serait déjà colossal, sous réserve que ce soit possible, qu'on parvienne à en produire en quantité suffisante (parce qu'il en faudrait quand même un paquet !), la stocker sur des périodes de temps très importantes, etc etc : le défi me parait insurmontable à tout jamais, mais ça peut sans doute se discuter.
Cette même approche quantitative peut être faite en énergétique pure, c'est d'ailleurs ce que présente Rolland Lehoucq que beaucoup doivent connaitre ici. Et le résultat est idem, même s'il affiche un certain optimisme :D