Thierz a écrit:Moi je me demande surtout si cette méthode de prototypes successifs qui ne volent pas est bien pertinente. Les voir mettre à la benne des prototypes entiers n'ayant pas volé 1) n'apporte pas d'expérience et 2) tend à laisser penser que SpaceX est toujours plutôt pessimiste sur les chances de succès de ces derniers. En bref, je me dis que le retour sur investissement de chaque proto ainsi détruit est négatif, mis à part que ça permet de garder des équipes opérationnelles... Il est temps que l'autorisation de vol arrive, si vous voulez mon avis !
C'est une question tout à fait compréhensible, mais personnellement je ne suis ni choqué ni surpris par cette méthode, qui est cohérente avec le discours constant d'Elon Musk : l'objectif le plus difficile à atteindre, et de loin, n'est pas de faire voler le couple Super Heavy / Starship mais de faire démarrer une chaîne de production pour la construction en série de ce nouveau système de transport spatial.
Les prototypes construits, non utilisés et non testés concourent à ce projet. Evidemment, il serait mieux de faire d'une pierre deux coups, de faire des essais, de réaliser un vol avec chaque prototype. Mais même lorsque ce n'est pas le cas, les savoir-faire acquis sur la chaîne de production sont extrêmement utiles. Sans ces prototypes envoyés au rebut, le projet n'aurait aucune chance d'aboutir.
En effet, le but n'est pas de fabriquer un SLS bis, qui effectue au mieux une dizaine de vols coûteux et puis disparaît à tout jamais de la scène astronautique. Le but est de lancer une chaîne de production en série de vaisseaux spatiaux. Au départ, cette chaîne de production avance par tâtonnements, elle mettra beaucoup de temps avant de se stabiliser. Elle continuera ensuite à évoluer de manière incrémentale. Elle ne s'arrêtera jamais.
La méthode de Musk apporte une variante à la théorie de Schumpeter sur la "destruction créatrice". L'investissement de départ est énorme, j'en conviens, c'est une des plus grandes prises de risques de tous les temps. Mais si le projet tient ses promesses, le retour sur investissement sera probablement le plus grand de toute l'histoire industrielle.
C'est une chance que l'homme le plus riche du monde soit aussi le plus audacieux, voire le plus téméraire. C'est aussi un grand risque. Assumons le suspense et soyons patients. Musk, qui ne l'est pas, a acheté Twitter, pour se donner des émotions. Mais il n'a pas abandonné le Starship, qui est le projet le plus excitant de sa vie.