Space Opera Jeu 1 Juil 2010 - 22:10
J'ai voté non également, sauf sur certains points particuliers.
Je m'explique brièvement: le programme Apollo est le fruit d'une singularité de l'histoire, qui a aboutit à ce programme contre-nature qui a couté des sommes folles et accouché d'un symbole dont les gens qui en ont une trace affective vont disparaitre dans les années et les décennies à venir. Contre-nature, car personne n'est allé sur la Lune par esprit pionnier, ou pour l'exploration, les raisons étaient beaucoup plus idéologiques que cela.
D'après moi, citer en exemple (ou pire, en "référence") un programme au prix exorbitant dont il n'est rien sorti, si ce n'est des photos et des souvenirs, on court à la catastrophe si on compte imiter ce qui s'est passé à l'époque.
La seule chose qu'a prouvé Apollo, et ce n'est pas à jeter (c'est même extrêmement positif), c'est qu'il est possible de réaliser des projets technologiques fous quand les moyens sont conséquents.
40 ans après, Apollo reste l'exemple type du programme technologique qu'il ne faut pas suivre, tant le rapport argent dépensé/retour sur investissement est faible. On parle souvent des quelques progrès, bien réels, apportés par Apollo: calculateurs, matériaux, etc... Ce qui n'est pas souvent dit, c'est combien ces progrès terrestres auraient été plus important si l'argent dépensé pour Apollo avait été ciblé sur le développement de ces technologies uniquement. Certes, ça n'est pas possible de faire de la R&D avec de telles sommes, mais il faut bien se rendre compte que d'un point de vue technologique, Apollo a été du gaspillage pour 99% du budget, le 1% restant étant l'héritage concret du programme.
Si l'héritage avait été une base sur la Lune ou un voyage vers Mars, la proportion du gaspillage aurait été bien plus faible, mais dans ce programme monté à la vitesse de la lumière, il est illusoire de croire que les ingénieurs croyaient réellement qu'une suite était possible.
Pour ce qui est du retour d'expérience, soyons honnêtes, il est quasiment nul. Pas en 1975, c'est certain, mais 40 ans plus tard, les ingénieurs de la NASA le disent bien: il faut tout reprendre depuis le début. Tout ce qui a été fait à l'époque est inexploitable, et les seuls retours d'expérience concrets sont très vagues: "On résiste aux radiations", "il y a de la poussière corrosive", "c'est très complexe", etc... Bref, des choses qui ont certes de la valeur, mais pas les quelques % du PIB américain qui avaient été dépensés à l'époque, très loin de là.
D'un point de vue économique, Apollo est typiquement une "bulle" qui a éclaté tout de suite, à la différence que par rapport à une bulle, personne ne concevait ce programme pour qu'il puisse être durable. C'était un feu d'artifice éphémère annoncé, dont seul le contexte de guerre et de terreur de l'époque pouvait justifier d'engloutir de telles sommes sans une révolte du peuple américain.
La conquête de la Lune de Kennedy est par certains aspects ressemblant à la guerre en Irak de Bush, en version civile. Je suis évidemment d'accord que c'est mieux pour tout le monde de voir les américains vouloir marcher sur la Lune plutôt que bombarder des villages, mais les raisons profondes à ce genre de "folie économique" ne sont pas forcément aussi éloignées que ce que l'on pourrait croire de prime abord.
Pour revenir à la question du début: Apollo, une référence ? Non, et ce n'est pas pour rien qu'aucun programme à vision lointaine, même s'il n'existe que sur le papier sans volonté politique, d'aucune agence, ne ressemble au programme Apollo. Au contraire, tout le monde veut éviter le "syndrome Apollo" du GG$ à usage unique.
Certes, le résultat peut faire rêver (c'est mon cas en l'occurrence), mais doit davantage nous rappeler à quoi ressemble la conquête spatiale irraisonnée, et sans la moindre notion idéaliste et d'exploration derrière.