Kostya a écrit: lambda0 a écrit:spacemen1969:
Je pense que Spaceman voulait dire que la conquête spatiale est liée à quelques particularités culturelles propres à notre civilisation, ce en quoi je suis assez d'accord avec lui.
A ma connaissance, il n'existe aucun "gène" poussant vers la conquête spatiale, ni même de "flèche de l'histoire" globale de l'humanité pointant vers l'expansion dans l'espace.
Je m'inscris en faux autour de cette affirmation. Même parmi les civilisations les moins expansionnistes tels les Mélanésiens, il a existé une pulsion irrépressible de "quitter leur île" et d'aller voir ailleurs (au moins par curiosité qui est bien inscrite dans nos gènes). Je pense au contraire que l'homme est apparu au bout de la chaîne de l'évolution comme un nomade qui allait de terres en terres au gré des ressources qu'ils trouvaient => du point de vue des minerais (y compris, l'eau, le plus important pour notre forme de vie) ou de l'énergie qui en découle (moteur, comme chacun le sait, du développement durable ou non), nous sommes globalement restés des "cueilleurs/pêcheurs/chasseurs" et la sédentarisation n'a rien changé à cette dépendance vis à vis des ressources qui nous sont accessibles (l'avènement de l'agriculture n'a fait que reporter sur l'eau et les sols, ce qui agissait jadis directement sur la faune et la flore). Lorsqu'un peuple reste plus de quelques siècles au même endroit, il en épuise les moindres ressources (ça aussi doit changer sur le modèle de la gestion des ressources qu'est obligé d'avoir l'homme dans l'espace car même le soleil est une source d'énergie épuisable à terme) et finit par être confronté au besoin inévitable de migrer. La seule chose qui soit purement culturelle chez nos peuples, c'est le mythe du Jardin d'Eden qui n'existe pas dans la réalité et c'est plutôt l'image d'un être humain en perpétuelle quête de nouvelles terres qui jalonne l'histoire de tous nos peuples.
Je pense que c'est une explication finaliste a posteriori du même type que celles qui en biologie font pointer l'évolution vers l'apparition de la conscience et de l'homme (et dans le cas de l'évolution biologique, ce point de vue est bien périmé, faute de preuves convaincantes).
Et quelques exemples judicieusement choisis ne démontrent rien, on trouve autant de contre-exemples, des sociétés statiques qui ont peu changé pendant des dizaines de millénaires, et également de sociétés qui ont disparu plutôt que de migrer.
Lire aussi Levi-Strauss, par exemple, "Anthropologie structurale", sur ces sociétés qui font des efforts conscients pour tendre vers la stabilité, et non vers l'expansion.
A toutes les époques, il s'est trouvé des théoriciens pour essayer de donner un sens à l'histoire, de préférence pointant vers la société dans laquelle ils vivaient ou vers la société telle qu'ils la rêvaient.
Pour les hommes du Moyen-Age, l'histoire était orientée de la Genèse vers la fin des temps, l'Apocalypse.
Dans la Chine traditionnelle, l'histoire était plutôt conçue comme cyclique, rythmée par la succession des dynasties et des périodes de chaos, mais sans progrès d'un cycle à l'autre.
Et je ne parle pas de l'interprétation marxiste de l'histoire, également très finaliste.
De nos jours, on invoque la biologie et on sélectionne quelques exemples historiques pour faire pointer l'histoire vers progrès et expansion, et même expansion dans l'espace.
Mais quels sont exactement ces "gènes" de l'expansion ?
Pourrais-tu citer un article de biologie moléculaire les situant précisément sur l'ADN humain ?
L'expansion de l'homme sur Terre a été particulièrement lente, il a fallu des centaines de milliers d'années, et il n'est pas
nécessaire d'invoquer un quelconque gène pour celà : un aveugle marchant au hasard et changeant de direction de temps en temps, au gré des événements et besoins ponctuels, sans aucun but global, s'éloigne de son point de départ. Tant qu'il ne rencontre pas d'obstacle.
Quant à ce "besoin irrépressible" des mélanésiens de quitter leur île, je pense que c'est encore une interprétation a posteriori, une reconstruction arbitraire, comme le suggère la grande variété des comportements d'une tribu à l'autre quand elles étaient confrontées à un problème de ressources.
Je ne dis pas que l'histoire est totalement aveugle et contingente, sans aucune direction privilégiée, mais simplement qu'il n'y a aucune indication très probante que si une telle direction existe, elle pointe vers l'expansion de l'homme dans l'espace.
Cette expansion peut avoir lieu ou non, en fonction d'innovations et de découvertes fortuites, qui peuvent se produire ou non, de quelques individus audacieux, qui peuvent naître ou non.
Il n'y a rien d'inéluctable dans tout cela.
Pour ce qui est d'Apollo, et du rapport des américains à la conquête spatiale, je remarque que dans les documents idéologiques, produits par les "think tanks", ainsi que dans les discours politiques, reviennent assez souvent des expressions comme "destinée manifeste", qui me paraissent être caractéristiques d'une interprétation finaliste de l'histoire, qui nous fait même parfois un peu sourire, nous autres européens, quand elle est complétée par "destinée manifeste des Etats-Unis".
A+